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  Octobre 2005
     

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Valeur ajoutée et système d'information (2/2)

Par Nicolas Humeau

 
   

 

Après avoir souligné les limites de l'externalisation et les questions qu'elle soulève, nous avons précédemment proposé une définition de la valeur ajoutée par le système d'information. Nous confrontons cette définition à deux approches éprouvées de la valeur : une approche financière par le haut de bilan (goodwill) et une approche organisationnelle par la logique du client interne. Nous concluons par une interrogation sur la subjectivité de toute mesure.

Système d'information et création de valeur financière : le haut de bilan

La finance d'entreprise nous amène à lier le système d'information à la valorisation du capital immatériel d'une organisation. Plus précisément, notre propos est de déterminer si le système d'information (ou certaines seulement de ses composantes) peut être considéré comme un actif, dont la valeur ferait partie intégrante du haut de bilan, au titre du goodwill.

Le goodwill, dont la valeur bilantielle est sommée avec la valeur dite "patrimoniale" afin de donner une vision fidèle de l'organisation à un instant "t", comprend certains éléments qui le relient, au moins indirectement, au système d'information. Pierre Vernimmen (1998, p. 661) indique par exemple : "La notion de goodwill explique pourquoi, à un moment donné, grâce à son savoir-faire, au dynamisme de son équipe dirigeante ou à sa position stratégique, l'entreprise peut être plus rentable. Le goodwill est cet actif supplémentaire imputable à aucun actif, propre à l'entreprise".

La capture et la préservation de ce "savoir-faire" se trouvent de facto au cœur de nombreuses initiatives actuelles de gestion des connaissances, dont le support privilégié est le système d'information. De même, le "dynamisme" d'une équipe dirigeante renvoie plus globalement à sa capacité à prendre la bonne décision au bon moment, ce que l'ensemble du domaine applicatif décisionnel réussit de mieux en mieux à favoriser. Dans bien des environnements, privé des remontées d'informations issues des outils analytiques et décisionnels, piloter serait voler à vue plutôt qu'aux instruments !

D'autres auteurs pratiquent une distinction plus marquée entre les facteurs internes recensés ci-dessus et des facteurs externes qui en sont pour partie la conséquence, comme la réputation d'une marque ou la confiance dans un dirigeant charismatique. Mais, même en se limitant aux seuls facteurs internes, tous s'accordent sur l'importance de la maîtrise par l'organisation de son "métier", qui se traduit par son patrimoine de compétences et leur cristallisation dans des brevets ou des savoir-faire spécifiques. Or, à nouveau, la valorisation de ce capital humain, de ce capital de connaissances, n'est-elle pas à l'origine de nombreux projets de services informatiques ? Combien de cahiers des charges sont aujourd'hui ainsi intitulés ?

Il apparaît donc que le système d'information participe de la constitution du goodwill, qu'il en est à la fois facteur et vecteur. Se pose alors la question des composantes du système d'information en tant que modalité du goodwill. Ces composantes sont-elles un simple véhicule pour les éléments constitutifs du goodwill, auquel cas les comptabiliser reviendrait à comptabiliser deux fois la même chose, ou sont-elles un tout supérieur à la somme de ses parties (cet "actif supplémentaire" invoqué par Vernimmen), auquel cas la création d'une valeur ajoutée propre justifierait une comptabilisation ? Par ailleurs, si nous leur reconnaissons une valeur ajoutée propre, il s'agit officiellement d'un actif. Au moins deux nouvelles questions se posent dès lors : comment en estimer la valeur ? Les amortir (on notera cependant que la nouvelle norme IFRS 3 ne soumet plus le goodwill à l'amortissement) ?

Nous observons ici que la création de valeur par le système d'information relève de processus :

- internes, car le goodwill est spécifique à une organisation ;
- à long terme, car nous nous référons à un actif ;
- indirects, car le goodwill ne se matérialise que "en creux" ;
- structurels, car ils impactent le bilan ;
- collectifs, car le goodwill l'est par construction ;
- en partie subjectifs, car la valorisation du haut de bilan varie d'un agent économique à l'autre.

Système d'information et création de valeur dynamique

Prahalad et Ramaswamy (2003) expliquent que la création de valeur résulte de "l'expérience utilisateur", dans laquelle une offre de services (ici portée par le système d'information) rencontre un besoin de services, né d'une situation donnée (un professionnel confronté au besoin d'obtenir une information, ou d'agir sur un processus). La valeur est initialement latente, de même que le besoin de services. Seule l'offre de services est toujours tangible, comme l'est parfois la demande (à savoir le besoin, une fois exprimé). La création de valeur est alors dynamique, car elle résulte de la rencontre entre un besoin ou une demande et une offre, mais n'y préexiste pas. Elle sera plus ou moins importante en fonction de l'intensité combinée des attributs de chacun des termes de l'équation :

- plus le besoin sera intense et urgent (critères auxquels il faut ajouter la précision s'il s'agit d'une demande) ;

- plus l'offre sera riche, disponible et pertinente…

… plus la valeur créée sera forte.

Ainsi envisagé, le système d'information devient un potentialisateur de valeur, qui doit se financer dans une logique d'investissement plutôt que de coût, et dont les principaux pré-requis sont d'avoir cerné :

- côté utilisateurs, dans quelles situations et pour quelles populations des besoins professionnels naissent, et sous quelle forme de demande ces besoins sont adressés ;

- côté système d'information, quel portefeuille applicatif est pertinent, et comment délivrer les services correspondants contextuellement et rapidement en situation.

Nous observons ici que la création de valeur par le système d'information relève également de processus :

La logique de création de valeur se complexifie ensuite en prenant deux directions complémentaires :

- à court terme, car se déroulant dans l'instant d'une interaction ;

- directs et individuels, car découlant d'une succession d'expériences uniques dans l'interaction avec le système d'information ;

- locaux, car résultant d'une dynamique hic et nunc.

Nous confirmons en outre que cette création de valeur est en partie subjective, car évaluée en situation par chaque acteur.

La subjectivité n'est pas l'ennemie de la valeur

Si certaines modalités de la valeur sont individuellement objectives (par exemple la valeur actionnariale à un instant "t"), LA valeur - en tant que notion plurielle - est nécessairement subjective. Ne serait-ce que parce qu'elle dépend de facteurs humains dans sa détermination, dans la mise en œuvre de ses conditions de réalisation et dans son appréciation. Se défier de la subjectivité, comme semblent le prôner les appareillages méthodologiques actuels, ne peut être que contre-productif.

Ainsi, bien que le plus souvent relative, observable hic et nunc et au final subjective, la création de valeur par le système d'information est indéniable et donne prise à la définition et à la caractérisation.

[Fin de la seconde partie]

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Pour en savoir plus

Dans le 360Journal

ROI des projets e-business : entre nécessité économique et impasse méthodologique


Ailleurs sur le Web

Association Française pour l'Analyse de la Valeur (AFAV)

Réinternalisation : opération sensible !
- Journal du Net Solutions, mai 2005

Calling a Change in the Outsourcing Market
- Deloitte Consulting, avril 2005

IT Performance Scorecards
- Booz Allen Hamilton via CIO.com, novembre 2004

Références bibliographiques

Does IT Matter?
- Carr N., Boston, Havard Business School Press, avril 2004

Finance d'entreprise
- Vernimmen P., Dalloz, 2005

Intranet-Management - Humeau (N.), Economica, Janvier 2005

Communications

Bely J., Boulnois J.L. et Rao J., "Aligner action et stratégie grâce à la supra-mesure", L'Expansion Management Review, décembre 2003, p. 90 - 96

Prahalad C.K. et Ramaswamy V., "The New Frontier of Experience Innovation", MIT Sloan management review, vol. 44, n°4, 2003, p. 12 - 18


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