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  Octobre 2002
     

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Redevances, peau de chagrin du Ministère de la Culture
 
 
   


Par Cyril Demaria

Si l’adoption par la Commission Brun-Buisson du projet de redevance sur les supports numériques proposé par le Ministère de la Culture a eu un mérite, c’est celui de mettre en lumière une vision périmée de la politique culturelle française.

Quelques faits :
Le plan Brun Buisson
Dépêche AFP
Site officiel Ministère de la Culture
Date 4 juillet 2002
Réaction UFC-Que Choisir(VNU Net)
Historique VNU Net

Le statut des biens culturels a considérablement évolué à mesure que la numérisation bouleversait la chaîne de valeur des industries musicales, audiovisuelles et littéraires. Pour bien percevoir cette transformation, il convient de revenir brièvement sur le mécanisme économique de production et de distribution des biens culturels.

Les projets artistiques sont conçus par un ou plusieurs créateurs et présentés à des producteurs chargés d’étudier la viabilité de ces projets et de les financer ; puis à des fabricants qui les transforment en " produits " commerciaux, les dupliquent et les livrent aux distributeurs qui les proposent à la vente. Le consommateur final les achète ou ne les achète pas, selon ses goûts, ses besoins et ses moyens. Le fruit de cette vente est distribué entre tous les acteurs et l’Etat, ce dernier prélevant taxes et redevances pour les redistribuer.

Les NTIC ont révolutionné la chaîne de valeur culturelle

Ainsi résumé, ce schéma restait à quelques variantes près globalement valide jusqu’à l’avènement des techniques numériques, qui ont tout d’abord permis de raccourcir les délais de production, en renouvelant en particulier les procédés de duplication. Elles se sont ensuite propagées en amont, pour proposer de nouveaux outils aux créateurs, moins chers et de plus en plus performants. La distribution a elle aussi été transformée, des marchands virtuels étant même apparus. La démocratisation de ces outils aidant, le consommateur a fini par s’approprier l’utilisation d’outils révolutionnaires inaccessibles jusque-là.

La valeur disruptive de ces outils réside dans l’effet de levier qu’accompagne leur introduction dans la chaîne de valeur : la numérisation diminue les coûts de chaque étape de la chaîne et change radicalement les contraintes de chacune de ces étapes. Cet effet de levier technologique est d’autant plus perceptible que les contraintes étaient pesantes. Habituellement, les contraintes s’élevaient à mesure que l'on progressait le long de la chaîne de valeur pour aboutir au consommateur. Celui-ci n’a longtemps eu pour choix que d’adhérer ou non à l’offre qui lui était faite. Personne n’a pu acheter un livre à la page, fut-ce un recueil de contributions ; ou bien se faire rembourser la vision d’un film qui lui a déplu. Un disquaire n’offre pas le moyen d’acheter une chanson à l’unité.

Le piratage, fruit d'une nouvelle perception du produit culturel

Ce qui a pu être perçu comme de la vente forcée était par la force des choses passé dans les mœurs commerciales, tout en s’accompagnant d’un phénomène de « piratage » croissant à mesure que la technique progressait (photocopies, créations de florilèges personnels de chansons). Perçu comme un vol pur et simple, le « piratage » de masse est aussi l’expression d’un changement de perception du produit culturel par le consommateur.

Le MP3 ou le DivX permettent de compresser la taille des fichiers musicaux et vidéo à qualité perçue constante pour les échanger grâce à des plates-formes P2P. Les consommateurs peuvent obtenir immédiatement un large choix de fichiers, sans perte de qualité notables, simplement et pour un coût infime. Vouloir taxer ces espaces d’échange est impossible, tout comme les espaces de stockage en ligne gratuits et illimités, accessibles directement par des périphériques reposant techniquement sur un stockage distant situé n’importe où (l'exemple des Network Computers montre que cela est même possible pour un PC si le débit de la bande passante est suffisant).

L’assiette des redevances est donc condamnée à devenir une peau de chagrin. Comme chez Balzac, les tentatives pour les empêcher de diminuer accéléreront son échec. Ainsi en va-t-il des formats sécurisés visant soit à maintenir le mode de commercialisation à l’unité, cas du SDMI pour la musique ; soit à limiter artificiellement la diffusion des œuvres, cas du CSS « zonant » les DVD. Cela se reproduira non seulement sur le plan technique, puisque à chaque créateur de protection correspond au moins une personne capable de décrypter cette protection ; mais surtout parce que ce système ne fonctionne que si le consommateur final l’accepte.

Or, libéré des contraintes du mode traditionnel de commercialisation, il a d’ores et déjà « voté avec son portefeuille » pour les solutions alternatives. Ce phénomène s’accompagnant d’une pénalisation pécuniaire de la chaîne de production et de distribution, le Ministère de la Culture se doit de réagir. Bien qu’encouragé à diminuer la TVA à 5,5%, mesure qui profite déjà au livre, pour modifier l’arbitrage entre le prix de l’original et le coût d’une copie et le rétablir au profit de la filière traditionnelle, il a à l’inverse souhaité élargir l’assiette de la redevance sur les supports numériques devant servir à rémunérer les auteurs.


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Liens


Entreprises citées

Bertelsmann


EMI

Liquid Audio
(Editeur de logiciels pour le secteur musical)

Napster
(Ex-filiale de Bertelsmann, spécialisée dans le P2P)

BMG
(Filiale de Bertelsmann, spécialisée dans l'édition musicale)

Edel
(Label musical indépendant)

TVT Records
(Autre label musical indépendant)


Autres Sites

SACEM 

Business 2.0 - Finally, a Reason to Listen to Listen.com
(à propos de Listen.com)

Business 2.0 - The Music Industry Turns a Corner
(à propos d'une nouvelle approche de vente de Vivendi Universal)

Context - Round 2.0
(voir notamment la section "Media distribution")

Business 2.0 - Techies and the RIAA: A Telling Truce?
(à propos du bouleversement introduit par les TIC dans le monde de la musique)

CNET - The RIAA's hollow victory over ISPs
(RIAA contre P2P - victoire à la Pyrrhus)

SVM - Taxe sur les copies privées : les industriels saisissent le Conseil d'Etat (distinction entre copie "patrimoniale" et "de confort")

(p2p)3 - Partage, ou meurs - Le point de vue d'un éditeur de musique
(point de vue iconoclaste sur les effets du p2p en matière de vente de musique)

O'Reilly network - Piracy is Progressive Taxation, and Other Thoughts on the Evolution of Online Distribution
(réflexion originale sur les effets du piratage sur le secteur de la musique)

Business Week - Big Music's Broken Record
(analyse des chutes des ventes démentant le discours des maisons de disques)

SiliconValley.com - The Great Recording Industry Business Model Contest: Winners' Circle
(analyse d'un professeur de la Sauder School of Business, University of British Columbia)


Références bibliographiques

Il était une fois Linux 
(biographie de Linus Torvalds, en particulier les pp. 245 - 273)


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