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  Septembre 2004
     

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L’information numérique et le dirigeant : entre caution morale et outil de pilotage

 
 
   
 
   


Par Nicolas Humeau et
Cyril Demaria

Trop souvent encore, la direction générale reste une fonction indirectement impliquée dans l’évolution des schémas directeurs informatiques, ainsi que dans leur traduction concrète dans les pratiques de gestion de l’information au quotidien. C’est un peu comme si la fracture numérique s’appliquait ici à l’envers : ce sont moins les « cols bleus » que les dirigeants eux-mêmes qui maîtrisent le moins les outils technologiques à leur disposition. Cet aveuglement est préjudiciable car deux enjeux applicatifs spécifiques à la direction générale, et relatifs au traitement de l’information numérique par le système d’information, se posent à court et moyen terme : viabiliser l’information et piloter l’activité grâce à elle.

Un enjeu de court terme, partagé avec la direction financière : viabiliser l’information délivrée à l’environnement

La lecture de la presse en atteste : la réglementation financière devient de plus en plus contraignante pour les entreprises cotées, et l’échelle des sanctions s’est élargie. Aux États-Unis, le Sarbanes-Oxley Act a, depuis trois ans, eu pour conséquence de pousser certaines sociétés à se retirer de la cote et de faire réfléchir les prétendantes. En France, la récente loi de sécurité financière a réformé le système de contrôle boursier et financier. Dans les deux cas, le législateur renforce considérablement les obligations des entreprises en matière de fiabilité de l’information financière publiée. Or, sans outils informatiques au service de l’exigence de compliance, rien n’est possible.

Le système d’information doit donc permettre par construction de :

- garantir que l’information est fiable car traçable, attribuable à un auteur et intègre. Ce n’est qu’à ce prix qu’elle devient exploitable ;

- prouver la diligence des décideurs, ce qui implique de veiller aux procédures d’acquisition ou de développement des composantes du système d’information, ainsi qu’à la documentation de l’évolution de ce dernier.

Cette gestion de l’information financière met directement en cause la responsabilité pénale du chef d’entreprise. Bien que la maîtrise d’ouvrage afférente revienne à la direction financière, et la maîtrise d’œuvre à la direction des systèmes d’information, le besoin - et la nécessité - de viabiliser l’information financière sont des enjeux partagés avec la direction générale. Une étude menée durant le premier trimestre 2004 par le portail decideo.com confirme ce constat : dans les 400 entreprises francophones interrogées sur les facteurs clefs de succès d'un projet de business intelligence, l'implication de la direction générale a été citée par un quart des répondants, ce qui correspond au deuxième plus important facteur, immédiatement après l’implication des utilisateurs eux-mêmes.

Les progiciels de gestion intégrée (PGI, ou ERP), associés à des silos de données (data marts) et des outils prospecteurs (data mining), semblaient être le moyen idéal pour faire face à ces contraintes, car ils délivraient une information réputée exhaustive, précise et directement exploitable. Or, l’informatique n’a sur ce plan résolu aucune question, car elle n’a pas été suffisamment intégrée au processus de production de l’information proprement dit : elle ne reste qu’un outil pour recueillir les données, les agréger, les traiter et les restituer.

Le fait que le Sarbanes-Oxley Act ait recourt à la signature des dirigeants pour garantir la véracité et la fiabilité des comptes, alors même que ces sociétés dépensent des sommes considérables pour se doter des meilleurs ERP, est un singulier désaveu de la stratégie prônant toujours plus de technologie.

Les directions générales semblent paralysées face à leur créature progicielle, lourde et coûteuse à réformer ou modifier. Elles sont soumises à un double impératif : conserver la maîtrise de l’information pour répondre, au besoin devant les tribunaux, de sa qualité ; et se fier entièrement à l’ERP mastodonte qu’elles ont mis en place pour répondre de leur sort. En attendant mieux, la transparence a pris le pas sur la pertinence de l’information, comme caution de moralité. Certaines sociétés cotées, à l’image d’Infosys, font figure de bon élève, mais d’autres ont abreuvé le marché de données rassurantes jusqu’à la veille de leur dépôt de bilan.

Un enjeu propre, mais de moyen terme : piloter par l’information

La direction générale possède également un besoin propre : acquérir un niveau de visibilité suffisant pour piloter l’activité. Ceci implique de disposer de l’ensemble de l’information opérationnelle, les données financières ne constituant ici qu’un volet parmi d’autres. Cette mise à disposition est l’objet du CPM (corporate performance management, gestion de la performance d’entreprise), concept qui résulte d’un phénomène d’agrégation autour de solutions de business intelligence (pour la dimension analytique) d’une part, et de BPM (business process management, ou gestion des processus de l’entreprise, pour la dimension opérationnelle) d’autre part. Le CPM se veut une synthèse, orientée décision, de ces domaines applicatifs respectifs.

En effet, la vision à 360 degrés sur les données et processus de l’entreprise, permise par ces domaines applicatifs, a fait germer l’idée d’une console virtuelle, à partir de laquelle un dirigeant pourrait visualiser sa stratégie en action, avant de la déployer par ce même canal. En faisant l’hypothèse que l’ensemble de l’entreprise est modélisée et régie par des applications informatiques, il deviendrait possible, en temps réel :

(1) de fournir une image du statut d’une entreprise à un instant « t » ;

(2) de simuler l’impact de telle ou telle décision sur son statut futur.

Ces deux premières étapes constituent l’EIS, executive information system, ou tableau de bord en ligne de la direction générale.

(3) de prendre la décision finale, le système d’information se chargeant de rendre opérationnels les paramètres stratégiques entrés.

Cette dernière étape fonde le CPM en tant que tel. Ainsi, par un curieux retour de bâton, l’évolution technologique, qui semblait avoir rendu obsolète le concept de planification stratégique (à savoir spécifier une cible à travers un programme pluriannuel, ainsi que les moyens pour l’atteindre), semble lui fournir l’opportunité d’un retour en grâce inopiné.

Bien que séduisante, cette approche systémique de l’entreprise n’est pourtant qu’une vision de moyen terme. Des raisons à la fois techniques (absence de standards autorisant une interopérabilité totale) et organisationnelles (hétérogénéité dans les modes de gestion des différentes structures d’une même entreprise) l’expliquent. Il est donc légitime de se montrer circonspect sur le discours enthousiaste de certains fournisseurs de solutions, à la recherche d’arguments de vente. Cet engouement n’est d’ailleurs pas sans rappeler le buzz généré par les ERP qui, près de dix ans plus tard, doivent encore délivrer certaines de leurs promesses… l’enjeu n’en reste pas moins vivace, mais dans un horizon temporel de moyen terme.

Pour conclure, même si la technique le permettait, supprimer toute incertitude ne serait pas nécessairement gage de saine gestion. La plupart des manuels ne définissent-ils pas l’art de diriger comme un pilotage en environnement incertain ?

 
 
 
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Dans le 360journal

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Autres articles

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New Sarbanes-Oxley Compliance Tools: The Help vs. the Hype - Business Finance, 6/2004

Corporate Performance Management - Journal du Net, 6/3/2003

Ressources

Loi relative à la Sécurité Financière - Légifrance

Entreprises citées

Infosys

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