[Suite]
Car comment contrôler les discussions d’ingénieurs
ayant travaillé ensemble pendant vingt ans et se trouvant tout à coup dans deux entreprises différentes et néanmoins
totalement complémentaires ? Comment tracer une frontière au jour le jour entre ce qui relève de l’échange
d’information privilégiée, sanctionné, de l’échange d’information non-privilégiée, pendant le barbecue du dimanche ?
Sans compter que la logique économique des nouvelles entités sera totalement bouleversée, puisque les activités « vache à lait »,
servant à financer les innovations, seront coupées des activités consommatrices d’investissements.
Et ce, alors que la solution de placer le code source de Windows en accès
libre aurait non seulement purgé le marché d’une rente de situation néfaste, mais surtout aurait donné un coup de
fouet à l’innovation tout en suscitant une stabilisation d’un système réputé pour son instabilité chronique et sa lourdeur.
Nul doute qu’un examen approfondi des vertus des logiciels libres aurait pu inciter le juge Jackson à trancher différemment…
S’il avait pu ouvrir sa stricte logique juridique pour faire véritablement œuvre de jurisprudence.
Troisième exemple : l’inévitable transformation des outils économiques
fondamentaux
L’échec récurrent des solutions de paiement sur Internet est régulièrement
imputé à l’absence de sécurité et de confidentialité dont souffre ce réseau. Plusieurs solutions ont été proposées, mixant
clés de cryptage, tiers de confiance, et échanges sécurisés. Le point faible de la chaîne réside dans l’interfaçage entre la
sphère monétaire classique et la sphère virtuelle.
Or, personne ne semble évoquer la possibilité de court-circuiter l’essentiel
des échanges avec la sphère monétaire classique pour constituer une sphère monétaire parallèle. Hérésie ? L’histoire monétaire
démontre la viabilité de la coexistence de plusieurs monnaies et de multiples étalons. Ce fut même la norme jusqu’au siècle
dernier. Ce mouvement ne fait que conforter et accompagner la multiplication des circuits d’échange.
Tout comme les consommateurs se voient dotés d’un nouveau pouvoir face aux
producteurs grâce au réseau, de nouveaux circuits de rémunération se constituent peu à peu : l’internaute est rémunéré
pour consulter de la publicité, il est payé pendant qu’il surfe, il peut gagner de l’argent en jouant et en entreprenant
toute une série d’activités.
La démocratisation de l’accès à la bande passante à haut débit crée un
marché pour la puissance processeur et certains gros consommateurs de puissance de calcul pensent déjà à rémunérer
l’internaute en échange de l’utilisation à distance de sa machine, pendant que celui-ci ne l’utilise pas. Cette rémunération
ne passera pas par les voies traditionnelles de transferts de fonds, mais par l’échange d’une unité convertible en biens et
surtout en services, un peu à l’image de ce que propose la jeune pousse beenz.com. Ceci est une profonde remise en question
du pouvoir monétaire des Etats et du lien social véhiculé par cet instrument classique.
Ainsi, c’est aux évolutions de l’économie dans son ensemble et aux modalités
d’association des acteurs les moins en phase avec l’évolution technique qu’il faut désormais s’intéresser.
|